L’exercice de la masso-kinésithérapie est personnel. Chaque masseur-kinésithérapeute est responsable de ses décisions, de ses actes et de ses prescriptions.

Le caractère personnel de l’exercice de la masso-kinésithérapie et la notion de responsabilité sont étroitement liés.

Ce principe s’impose quel que soit le mode d’exercice du professionnel.

I – EXERCICE PERSONNEL . L'exercice personnel auquel est tenu un masseur-kinésithérapeute consiste pour celui-ci à exécuter lui-même les actes professionnels qu’il ne peut, en principe, déléguer.

A) L’exercice libéral.

Dans le cadre de l’exercice ambulatoire, le masseur-kinésithérapeute (ou la société d’exercice) peut s’attacher le concours de masseurs-kinésithérapeutes collaborateurs, d’assistants ou de salariés. Chacun d’eux exerce personnellement la masso-kinésithérapie comme le rappelle l’article R. 4321-135 du même code et est responsable des actes qu’il réalise. Il en va de même pour le kinésithérapeute remplaçant.

B) L’exercice salarié.

Au sein des établissements de santé, publics ou privés, l’exercice du masseur-kinésithérapeute est personnel. Le travail s'effectue souvent en équipe et certaines décisions sont prises à plusieurs.

II – RESPONSABILITE DU MASSEUR-KINESITHERAPEUTE.

Dans l’exercice de son art, le masseur-kinésithérapeute est susceptible d’engager sa responsabilité disciplinaire, civile, pénale ou administrative.

Les fondements de la responsabilité du masseur-kinésithérapeute.

La jurisprudence considère que le professionnel de santé est tenu d'une obligation de moyens.

En effet, la cour de cassation, par un arrêt dit « Mercier », du 20 mai 1936 a considéré que « l’obligation de soins découlant du contrat médical et mise à la charge du [professionnel de santé] est une obligation de moyens, le [professionnel de santé] ne pouvant s’engager à guérir, il s’engage seulement à donner des soins non pas quelconques mais consciencieux, attentifs et conformes aux données acquises de la science ».

D’ailleurs, cette solution transparait de l’article R. 4321-80 du code de la santé publique qui dispose que « dès lors qu’il a accepté de répondre à une demande, le masseur-kinésithérapeute s’engage personnellement à assurer au patient des soins consciencieux, attentifs et fondés sur les données actuelles de la science. ».

La responsabilité civile et pénale du masseur-kinésithérapeute

La responsabilité du masseur-kinésithérapeute est engagée lorsqu’il n’a pas mis en œuvre tous les moyens nécessaires mis à sa disposition.

Ainsi, l’appréciation des fautes médicales est souvent délicate et s’apprécie par rapport à ce qu’aurait fait un autre professionnel de santé de la même spécialité dans les mêmes circonstances. La plupart du temps, le juge fait appel à des experts judiciaires.

A titre d’exemple, un juge pourra condamner un masseur-kinésithérapeute pour des fautes notamment de prescription, de gestes techniques inappropriés ou non conformes aux données acquises de la science.

En dernier lieu, il convient de souligner, qu’au titre de l’article L.1142-2 du code de la santé publique, chaque masseur-kinésithérapeute est tenu de contracter une assurance destinée à garantir les risques encourus en matière de responsabilité civile et professionnelle.

Ce principe de responsabilité du professionnel de santé, en cas de faute, a été codifié par le législateur et est aujourd’hui consacré par l’article L. 1142-1 du code de la santé publique qui précise « hors le cas où leur responsabilité est encourue en raison d’un défaut d’un produit de santé, les professionnels de santé […] ne sont responsables des conséquences dommageables d’actes de prévention, de diagnostic ou de soins qu’en cas de faute. […] ».

Le masseur-kinésithérapeute est responsable de la mise en œuvre d’un traitement au regard de la prescription médicale. Dans l’hypothèse où il estime que cette dernière n’est pas adaptée, il devra en informer le médecin prescripteur afin que ce dernier établisse une nouvelle prescription. Dans l’hypothèse où le médecin prescripteur refuse de modifier sa prescription il a le droit de refuser de mettre en œuvre le traitement s’il estime que la prescription n’est pas adaptée à l’état du patient. Il devra en informer le patient ainsi que son médecin et justifier sa décision par un argumentaire étayé, reposant notamment sur les conclusions de son examen clinique.

La responsabilité disciplinaire du masseur-kinésithérapeute.

Le masseur kinésithérapeute doit toujours, en toutes circonstances pouvoir justifier les décisions qu’il a prises, les actes qu’il a effectués et ne peut oublier les risques qu’il fait courir à un patient, même s’ils sont exceptionnels, ni ceux qu’il court indirectement.

Dès lors, le masseur-kinésithérapeute qui méconnait ses obligations disciplinaires pourra voir engager sa responsabilité devant une juridiction ordinale. Les sanctions sont indépendantes des peines prononcées par les juridictions civiles et pénales[1].

A titre d’exemple, le juge de la chambre disciplinaire nationale (CDN) affaire - n° 004-2015 et n° OOS-2015 du 17 mars 2016, a confirmé la sanction de la CDPI condamnant un kinésithérapeute à l’interdiction d'exercer la masso-kinésithérapie pendant une durée de trois mois assortie du bénéfice du sursis pour avoir notamment pratiqué plusieurs techniques non conventionnelles sur ses patients consistant pour l'une appelée « kinésiologie » à faire tenir à ses patients un tube contenant un produit pharmaceutique à proximité d'une source d'énergie, pour l'autre qualifiée de « primathérapie », dont il se revendiquait le créateur, qui se présentait comme un mélange de diverses approches holistiques et ne participait d'aucune pratique connue.

Enfin, le juge de la CDN – affaire nº 034-2019 du 7 février 2020, a sanctionné un masseur-kinésithérapeute à l’interdiction d’exercer pendant deux ans dont un an avec sursis pour avoir :

  • réalisé des d'actes ne relevant pas de la masso-kinésithérapie,
  • fait courir des risques injustifiés à une patiente,
  • recouru à des soins en l'absence de prescription médicale.
La responsabilité au sein des établissements publics de santé.

De manière générale, le masseurs-kinésithérapeute hospitalier a un statut administratif. Dès lors, dans la mesure où il intervient en tant qu’ « agent de l’administration » et le patient en tant qu’ « usager du service public », seule la responsabilité de l’établissement public peut en principe être recherchée.

Néanmoins, de manière exceptionnelle, quand il peut être considéré que le masseur-kinésithérapeute a commis une faute personnelle détachable de ses fonctions, ce dernier devra répondre personnellement de sa faute en engageant sa responsabilité civile. La jurisprudence considère qu’il s’agit d’une faute d’une gravité exceptionnelle qui ne peut raisonnablement être rattachée au fonctionnement du service.

Les choses se passent donc, au point de vue juridique, un peu comme si le « contrat de soins » était conclu entre le patient et l’établissement de santé. Cette évolution qui déplace une partie de la responsabilité ne manque pas de s'accompagner d'un certain transfert de l'autorité.

Un masseur-kinésithérapeute hospitalier peut toutefois être poursuivi personnellement devant les juridictions pénales pour homicide, coups et blessures, faute technique supposant une méconnaissance manifeste de l'art médical, absence de consentement du patient, non-assistance à personne en péril, manquement au secret professionnel, etc.

Depuis la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, un professionnel de santé hospitalier peut être traduit devant la juridiction professionnelle de l'Ordre, pour des faits se rattachant à sa fonction hospitalière publique, par le ministre chargée de la santé, le représentant de l’Etat dans le département, le directeur général de l’ARS, le procureur de la République, le Conseil national ou le Conseil départemental au tableau duquel le praticien est inscrit (article L.4 124-2 du code de la santé publique rendu applicable au masseur-kinésithérapeute par l’article L. 4321-19 du code précité).

La responsabilité au sein des établissements privés de santé.

Le masseur-kinésithérapeute salarié d’un établissement privé agit sous la responsabilité de son employeur sauf s’il commet un abus de fonction, et ce sans que le principe de son indépendance professionnelle puisse être remis en cause et qui le laisse seul décider du choix de ses actes avec la patient (note de bas de page : arrêt de la cour de Cassation dit « Costedoat », Assemblée plénière, du 25 février 2000, n° 97-17.378 97-20.152).

L’abus de fonction en droit privé est le pendant de la faute personnelle détachable du service pour le public. Autrement dit, le masseur-kinésithérapeute salarié n’engagera pas sa responsabilité civile sauf à commettre un abus de fonction, comme dans le public.

Enfin et contrairement au régime public le salarié exerçant au sein d’un établissement privé engage sa responsabilité disciplinaire vis à vis de ses patients.

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[1] Article L 4124-6 du code de la santé publique, applicables à la chambre disciplinaire nationale en vertu de l’article L 4321-19 du même code « les peines disciplinaires que la chambre disciplinaire de première instance peut appliquer sont les suivantes : « 1° l’avertissement ; 2° le blâme ; […] 4° l’interdiction temporaire d’exercer avec ou sans sursis ; cette interdiction ne pouvant excéder trois années ; 5° la radiation du tableau de l’ordre […] » ;